Post-partum : Notre périnée nous appartient !
Ingrid Bizaguet, danseuse, chorégraphe et pédagogue formée à la sociologie, l’art-thérapie et la méthode De Gasquet, rédige ce texte aux cotés de Pauline Higgins, sage-femme formée à l’anthropologie sociale, médicale et l’anthropologie des systèmes de représentation. Parce que le périnée ne disparait pas entre l'accouchement et la rééducation.
Tout d’abord, le périnée, qu’est-ce que c’est et à quoi ça sert ?
Le périnée est un ensemble de muscles et de tissus qui tapissent l’intérieur du bassin. Ils soutiennent nos organes qui eux, sont suspendus dans le bassin. Le périnée permet de fermer les sphincters (anus, vessie et même vagin), ce qui nous apporte la possibilité de nous retenir. Il s’adapte à la pression créée dans l’abdomen. Il est mobilisé de façon consciente ou non lorsque l’on respire, que l’on tousse, que l’on bouge, que l’on crie, que l’on a très envie de faire pipi, que l’on fait l’amour…
Lorsque l’on inspire, le diaphragme descend, les poumons se remplissent d’air, se gonflent, les organes sont donc repoussés vers les bas, le périnée s’étire. Lors de l’expiration, c’est le mécanisme inverse, et le périnée remonte avec les organes parce qu’il n’y a pas de vide dans l’abdomen. Le diaphragme, les viscères et les tissus du périnée sont solidaires. Tout cela, sans que nous ayons besoin d’y penser. Les muscles du périnée alternent des phases de contraction et de détente de façon autonome. Mais ce mécanisme ne peut se faire que sous certaines conditions. Si le ventre est libre de bouger, s’il y a assez d’espace entre la cage thoracique et le bassin, si l’on se tient dans un certain alignement, tout se fait aisément. Allongé sur le dos, c’est facile de sentir son mouvement. Debout, cela est encore possible. Mais dans la position assise ou demi-couchée tout est beaucoup plus compliqué. Si nous ne sommes pas bien assis sur nos ischions le périnée ne peut pas retrouver la tonicité de base dont il a besoin pour fonctionner de façon autonome, pour alterner les phases d’ampliation et de rétention.
Lors du travail, qui est un processus tissulaire et musculaire, puis lors de l’accouchement, le périnée est étiré au maximum, parfois abimé. Cela peut créer par la suite la sensation d’une élongation, un peu comme une entorse. Pour certaines femmes, c’est à ce moment là qu’il apparait. Il prend vie parce que l’on éprouve des douleurs, de l’inconfort, de le gêne ou de la peur. Connaitre cette zone permet de comprendre ce qui se passe, de reconnaitre les signaux envoyés, de le détendre au moment du passage du bébé, de dédramatiser.
On repart de la maternité avec un petit être qui ne parle pas et dont on doit prendre le plus grand soin, une ordonnance pour un mode de contraception (même si l’idée de retrouver une vie sexuelle n’est pas complètement au coeur de nos préoccupations), et une autre ordonnance pour des séances de rééducation du périnée. Rééducation ? Cela veut donc dire que le périnée a été éduqué et qu’il a perdu son éducation ??? On nous demande d’attendre 6 semaines avant de la débuter. Ok. Mais je fais quoi avec mon périnée en attendant ?
Et puis qu’est-ce que c’est que cette rééducation au juste ?
En France, la rééducation du périnée est proposée en moyenne 6 semaines après l’accouchement. Dix séances sont généralement prescrites, à faire avec une sage-femme ou un kinésithérapeute spécialisé. Dix séances pour (re)trouver comment contracter les différentes zones de son périnée et acquérir ce que l’on appelle le « verrouillage périnéal à l’effort » comme certains praticiens le disent. Dix séances de 30 minutes environ, soit 5 heures en moyenne.
Pour élaborer ma façon de prendre en compte le périnée dans ma vie de danseuse autant que dans ma vie de femme, j’ai rencontré des professionnels. Et c’est avec Pauline Higgins, sage-femme, que nous avons fabriquer les journées Danse&Périnée en articulant nos connaissances et nos pratiques.
Le travail auprès des futures mères et de jeunes accouchées, l’avancée actuelle des connaissances en matière de physiologie, le travail auprès des danseurs et les recommandations en vigueur nous amènent à penser que :
- La meilleure des rééducations passe par une prise de conscience du périnée pendant la grossesse, tout au long de la vie et par une chute des tabous.
- Il faut apprendre à reconnaitre les mouvements du périnée avant le terme de cette grossesse pour pouvoir le mobiliser dès que l’on a accouché.
- La conscience du périnée et de sa mobilité volontaire et involontaire doit faire partie intégrante de toute pratique prénatale.
- La « vie » du périnée et ses mouvements doivent faire partie d’une conscience globale de la posture et de la respiration.
- Il faut commencer chez soi, tout de suite après l’accouchement, à écouter les mouvements autonomes du périnée et débuter quelques mobilisations conscientes, sur l’expiration, sans pousser sur le ventre.
- Il faudrait utiliser les dix séances avec la sage-femme ou le kinésithérapeute pour consolider nos connaissances et profiter de son expérience pour vérifier et améliorer cette gymnastique globale que nous devons faire de façon individuelle, personnelle et quotidienne.
- Lorsque nous avons eu une césarienne, le travail ayant eu lieu de la même façon, la mobilisation puis la rééducation doivent se faire, à l’écoute de ce que les tissus sont capables d’entreprendre.
- Il faudrait ne pas hésiter à demander plus de séances si nous ne sommes pas certaines de nous.
- Il est indispensable de penser à se redresser et s’étirer dès l’accouchement, monter les bras en expirant, sur le dos jambes pliées monter le bassin, méditer, se relaxer, faire des fausses inspirations…
- Bien se placer lorsque l’on porte ou allaite bébé est primordial, tout comme penser à respirer.
- Une bonne posture et une bonne assise permettront au périnée de retrouver plus vite sa tonicité physiologique.
Le corps des femmes leur appartient. La médicalisation de l’accouchement et des pratiques touchant à la périnatalité ne doivent en aucun cas les éloigner d’un travail sensoriel d’appropriation de soi. Le développement de l’écoute de soi et la pratique corporelle, réalisée avec des professionnels formés, ne feront que faciliter l’accouchement autant que la période post-partum. Le terme « rééducation » implique qu’il y ait eu une éducation ou du moins une acquisition de connaissances qu’elles soient empiriques, transmises ou ressenties. Il est temps de porter attention à soi, de mettre des mots sur le corps et d’écouter les maux de son corps imaginaire.
Ingrid Bizaguet & Pauline Higgins / Illustrations Cyrielle Lefebvre et Ingrid Bizaguet
Pour pratiquer et se former…
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Les samedis 11h30-13h > 15/09, 20/10, 24/11, 15/12, 19/01, 16/02, 23/03, 13/04, 18/05, 15/06
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Vendredi 15 et samedi 16 mars 2019 - Luxembourg
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