Retour sur le colloque du 28 septembre 2024
Samedi 28 septembre se sont regroupés, dans le magnifique studio du Regard du Cygne, des danseurs et des danseuses, des médecins, infirmières, sages-femmes, psychologues, ostéopathes, psychométriciennes, géographes, sophrologues, enseignants, éducateurs spécialisés…
Nous avons écouté les récits pleins d’humilité des intervenants qui, chacun à leur manière, partagent la danse, la création artistique et la conscience attentionnée, avec des publics spécifiques. Nous avons écouté et mis en relief ces approches pédagogiques, artistiques ou thérapeutiques qui offrent un espace pour (re)devenir sujet, à part entière.
Ces intervenants, je les connais, ce sont mes amis et connaissances de longue date. Je n’ai pas cherché des intervenants pour faire un colloque. J’ai fabriqué un colloque pour mettre en valeur leurs démarches et leurs approches.
J’ai rencontré Clint Lutes, danseur professionnel incroyable, en 2012 lorsqu’il créait DaPoPa. Il avait besoin d’une structure pour faire naître son projet et je l’ai accueilli avec Mouvement Contemporain. Et je suis tout de suite tombée amoureuse de sa façon magique d’utiliser le beau, pour faire du bien, d’utiliser des procédés chorégraphiques complexes avec des amateurs, avec des patients souffrants de Parkinson et avec les soignants. Il n’adapte pas la danse, il a confiance en la capacité de chacun de fabriquer du beau.
J’ai rencontré ensuite Pauline Higgins en 2015 et j’ai grandi, avec ses milliards de questions, ses milliards de représentations pointues du monde. Et Pauline a rencontré Mathilde.
J’ai rencontré Amélie De La Fontaine en 2017, enseignante en REP, et j’ai été émue par sa capacité à voir dans chaque enfant, aussi indiscipliné soit-il, un artiste qui sommeille.
J’ai rencontré Marie Berger, psychomotricienne et danse-thérapeute, et son regard professionnel qui sait poser des mots sur des choses que je ne savais que penser. Marie m’a aidée à mettre des concepts existants sur des intuitions. Elle sait faire lien entre théorie et vécu corporel, en restant toujours à sa place.
Et j’ai rencontré Nadège Bonneton, médecin et danseuse, et ses yeux immenses dans lesquels se reflètent les âmes de tous ces soignants qui souffrent.
Puis le destin a mis l’artiste chorégraphique Julie Lamoine, et son gros ventre, sur mon chemin. Et j’ai pu voir fonctionner tout ce que j’avais imaginé pour accompagner la grossesse des danseuses professionnelles. Sa capacité à lire le monde, et les besoins des individus et des institutions, m’a impressionnée. Julie partage la danse avec tous les publics, en prenant garde de ne pas « prendre en otage » celles et ceux qu’elle rencontre dans ses ateliers de médiation artistique. Elle n’utilise pas la danse pour se mettre en avant mais pour aller au service de l’autre, dans des projets et des ateliers à visée thérapeutique, éducative, sociale…
Elle nous a offert une réflexion sur l’éthique de l’intervenant auprès des publics et l’articulation entre les besoins exprimés, les besoins observés et les besoins de l’institution. Vers un recul nécessaire au bon positionnement du professionnel qui cherche à utiliser la création artistique dans sa pratique. Vers l'utilisation de la supervision comme moyen de rester à la bonne place, à la bonne distance.
Chacun, à sa manière, démontre qu’il est possible de faire danser, dessiner, écrire, non pas pour se montrer soi mais pour amener chacun à devenir soi, à s’affirmer, s’enraciner, dans une démarche altruiste, humaniste, décentrée. Prendre soin de soi, pour prendre soin de l’autre et prendre soin du monde.
Nadège nous a entrainé généreusement dans une danse du centrage, de l’ancrage, de l’enracinement… Avec une simplicité incroyable, Clint nous a fait signer dans l’espace, avec tout notre corps, et l’assemblée a repris les gestes de chacun, dans un rituel collectif et apaisant.
Je n’ai pas imaginé cette journée comme un temps de démonstration mais de cadeaux et de partage, comme si, apaisés, réparés, nous trouvions la joie d’être au milieu du monde. Comme si, ensemble, nous remplissions un peu notre besoin incommensurable de consolation.
Je remercie l’ensemble de l’équipe, Zab (Isabelle Bayard), Hélène, Zoé, Philippe, et les danseurs avatars de la Biomécanique des intentions, Estelle Carleton, Isabelle Bayard et Gael Giraud.
Je remercie chaque personne d’être venue, pour, je l’espère, cheminer vers une plus grande lisibilité des besoins de l’autre et de ses propres besoins, ne confondant pas ses désirs avec les besoins de publics spécifiques, à la recherche d’un espace pour prendre soin de soi en tant qu'individu, pour ensuite mieux prendre soin de l’autre en tant que professionnel.
Merci.
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